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SOCIOCRATIE

Origines

Le mot sociocratie est dérivé du latin societas (société) et du grec kratein (gouverner). Il s’agit de la gouvernance du ‘socios’, c'est à dire des personnes liées par des relations significatives entre elles. En comparaison la démocratie, est la gouvernance du ‘demos’, la masse des gens qui n’ont pas grand-chose en commun en dehors de certaines valeurs de base. L’autocratie quant, à elle, est la gouvernance d’une seule personne : ‘auto’.

Le mot sociocratie fut inventé par Auguste Comte au début du XIXe. Philosophe français, il est considéré comme l'un des fondateurs de la sociologie. Auguste Comte élabora un système de pensées et d’organisation connu sous le nom de « positivisme » qu’il considérait comme la base nécessaire pour une vie en société stable et l’épanouissement de l’individu dans le contexte de la révolution industrielle en émergence à son époque. Toutefois, Comte ne fut pas en mesure d’élaborer une structure pratique pour la mise en œuvre de ses idées.

Plus tard, le mot fut utilisé par le sociologue américain Lester Frank dans un article qu'il écrit pour le mensuel Penn en 1881 et plus tard encore par le hollandais Kees Boeke, qui appliqua le concept à l'éducation.

Ward, plus tard, élargit le concept dans ses livres « sociologie dynamique » (1883) et « les facteurs psychiques de la civilisation » (1892). Bien que rarement étudiés aujourd'hui, Ward fut très influent en son temps et eut une réputation mondiale en tant que sociologue révolutionnaire. Il nourrissait la croyance selon laquelle une population instruite est essentielle à la gouvernance efficace d’un pays. Il voyait venir l’époque où la nature émotionnelle et partisane des débats politiques ferait place à une discussion beaucoup plus efficace, objective et scientifiquement fondée, sur les questions et les problèmes. La démocratie évoluerait éventuellement vers une forme plus avancée de gouvernance, la Sociocratie.

Le pacifiste néerlandais, éducateur, Kees Boeke mis à jour et développa les idées de Ward dans le milieu du 20e siècle en créant la première structure d'organisation sociocratique. Boeke voyait la Sociocratie comme une forme de gouvernance ou gestion qui suppose l'équivalence des individus et repose sur le consentement. Cette équivalence ne s'exprime pas avec le slogan ‘un homme, une voix’ de la démocratie, mais plutôt par un groupe d'individus raisonnant ensemble jusqu'à ce qu'une décision soit prise qui soit satisfaisante pour chacun. Pour rendre opérationnels les idéaux sociocratiques, Boeke utilisa un système de cercles afin d'organiser le processus de prise de décision au sein d'une d’organisations plus grandes.

Au cours des années 70s, Gerard Endenburg, étudiant de Boeke, développa et appliqua les principes de celui-ci dans son entreprise d’ingénierie électrique. En tant qu’ingénieur, Endenburg ajouta sa compréhension de la physique, cybernétique et systèmes intelligents, aux théories sociales, politiques et éducationnelles de Comte, Ward et Boeke. Il en résultat une méthodologie formelle nommée « Méthode de gouvernance des cercles sociocratiques »

Challengé par Boeke, avec lequel il demeurait ami, il formula pour la première fois, au début des années 70, les quatre règles de gestion qui, en dotant l’organisation d’une structure de communication et de prise de décisions appropriées, encouragent des comportements éthiques. Il a appelé son modèle de gestion, la Sociocratie, fidèlement à auguste Comte.

Les quatre principes directeurs de la méthode de prise de décisions politiques d’Endenburg

La prise de décision par consentement. Les décisions sont prises dès qu’il n'y a plus d'autre objection raisonnable. Les objections doivent être motivées, argumentées et fondées sur la capacité de l'objecteur de travailler à des activités productives relativement aux objectifs de l'organisation. Toutes les décisions d’orientation sont prises par consentement. Dès lors, le groupe est susceptible, par consentement, de décider d'utiliser une autre méthode de prise de décision. Au sein de ces politiques, les décisions opérationnelles journalières sont normalement effectuées de la manière traditionnelle.

Organisation en cercles. L'organisation sociocratique est composée d'une hiérarchie de cercles semi-autonomes. Cette hiérarchie ne constitue pas une structure de pouvoir telles celles des hiérarchies autocratiques. Chaque cercle a la responsabilité d'exécuter, de mesurer et de contrôler ses propres processus pour atteindre ses objectifs. Elle régit un domaine spécifique de responsabilités à l’intérieur des politiques des plus grandes organisations. Les cercles sont aussi responsables de leur propre développement ainsi que de celui de chaque membre. Souvent appelé « mode d’éducation intégrale », il est attendu du cercle et ses membres qu’ils déterminent ce qu'ils doivent connaître pour rester compétitifs dans leur domaine et atteindre les objectifs de leur cercle.

Le Double lien. Les cercles sont reliés au cercle supérieur par une liaison double composée du chef opérationnel et d'un représentant du cercle. Ces agents de liaison, membres du cercle, fonctionnent comme membres à part entière dans la prise de décision de leur cercle et le cercle supérieur. Le chef opérationnel d'un cercle est sélectionné par les membres du cercle supérieur et représente l’organisation supérieure dans le cercle de décision. Un représentant est choisi par les membres du cercle afin de représenter les intérêts du cercle, au niveau supérieur.

Au plus haut niveau de l'organisation siège le ‘Top Cercle’, semblable à un conseil d'administration traditionnelle, qui relie l'organisation à son environnement. Généralement, ses membres comprennent des représentants ayant une expertise en droit, gouvernance, finances (y compris des investisseurs), etc. et la mission de l'organisation. Le ‘Top Cercle’ comprend le CEO et les représentants du cercle de la direction générale. Chacun de ces membres de cercle participe pleinement au processus de décisions.

Election par consentement. Les individus sont élus à des rôles et des responsabilités suite à une discussion ouverte en utilisant les critères du consentement même, utilisé pour les décisions. Les membres du cercle sont tenus de se désigner eux-mêmes ou d’autres membres du cercle et de présenter les raisons de leur choix. Après discussion, les gens peuvent (et souvent) être amenés à changer leur candidature, ainsi l’animateur présentera l’élection de la personne pour laquelle il existe les arguments les plus forts. Les membres du cercle peuvent s’opposer, ce qui provoque un examen plus approfondi. Pour un rôle que de nombreuses personnes pourraient remplir, cette discussion peut se poursuivre pendant quelques tours. Pour d’autres ce processus est court, alors que moins de gens sont qualifiés pour la tâche. Le cercle peut également décider de choisir une personne qui n’est pas nécessairement membre du cercle.

Ces quatre principes directeurs sont les pré-requis indispensables pour qu'une organisation fonctionne sociocratiquement. Ils sont interdépendants, chacun soutenant l'application réussie des autres. En plus de ces quatre principes, l’organisation sociocratique applique le processus de rétroaction circulaire d’orientation-exécution-mesure à la conception des processus de travail

L’organisation en cercles sociocratiques fournit un moyen de production de premier plan sur la base de l'équivalence dans la prise des décisions, par le principe du consentement.

Un processus à quatre temps :

Il existe quatre temps forts dans l’introduction de la Sociocratie :

  • La sensibilisation, consiste à aider le client à reconnaître dans sa façon actuelle de fonctionner, les causes de ses difficultés soutenir sa motivation, pour changer les choses.
  • La mobilisation, c’est le moment de la constitution des cercles sociocratiques, de la formation des officiers de cercles, des chefs et des doubles liens, et de la mise en route proprement dite des cercles.
  • L’intégration consiste à réintroduire dans le cercle, des fonctions et des activités qui étaient réservées exclusivement au chef hiérarchique. Il y est question d’abandonner ses vieux réflexes pour en créer de nouveaux.
  • L’évolution comprend l’audit, l’analyse des données et la proposition pour la relance de la démarche. C’est l’étape très importante où l’on évalue le chemin parcouru et l’on relance le processus d’implantation et de maintien du mode de gouvernance sociocratique.